Marc, écrivain passionné depuis toujours par le destin des enfants de criminels de
guerre, part pour Belgrade pour enquêter sur le suicide de la fille du général Mladic,
alors que rien ne va plus dans sa propre vie. Là-bas il rencontre quelques-uns des proches lieutenants du général, la plupart recherchés pour crimes de guerre. Patiemment Marc les écoute ces personnes qui ont assassinés, parfois même
pour certain perpétuer des massacres, tout en essayant de ne pas les juger mais de comprendre comment on peut en arriver à haïr et tuer des gens qui étaient il y a encore peu de temps des amis, des voisins, seulement à cause de leurs croyances religieuses différentes.
Pas de manichéisme ici, personne n'est noir ou blanc, tous ont souffert et ont perdu des proches. Il s'aperçoit de la misère de ces gens qui se sont eux même enfermés à l'intérieur de leur frontière et refusent d'en sortir encore aujourd'hui. La haine est tenace, entretenue par un passé, une Histoire qui ne peut évoluer.
La force de ce roman réside dans la psychologie des personnages, tellement juste, pudique par moment mais toujours cruelle. On ne peut que ressentir la haine, le chagrin et la colère de ces personnages ainsi que toute la tristesse de cette guerre fratricide.
" C'est l'histoire qui nous punit. Notre histoire à chacun. Nous ne l'avons pas choisie, mais elle est là, nous la portons malgré nous, et il vient un moment où sa terrible présence écrase tout ce que nous avons essayé d'être, pensant que nous étions bien assez forts pour nous affranchir du passé. Ici aussi, les gens ont cru qu'ils pourraient
échapper à leur histoire, ils se sont aimés, ils ont eu des enfants, mais soudain ils se sont souvenus qu'ils avaient des raisons de se craindre, de trembler à la vue l'un de l'autre. Ils ont été troublés, puis emportés petit à petit par la mémoire de tout le mal
qu'ils se sont fait, autrefois, au temps de de leurs parents, de leurs grands-parents, et bientôt ils se sont découverts ivres de haine et de peur, et alors ils n'ont plus vu d'autres issues que de recommencer à se jeter les uns contre les autres."
Manon
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